Flixbus sanctionnée en Allemagne pour greenwashing
Le 20 février 2025, l’entreprise de transport par autocars Flixbus a été sanctionnée en Allemagne pour allégations environnementales trompeuses. La justice allemande reproche notamment à l’opérateur d’avoir utilisé des allégations environnementales générales et dépourvues de toute justification sur son site Internet belge.
La Cour fédérale de justice allemande a relevé plusieurs manquements à l’interdiction des pratiques commerciales déloyales sur le site Internet belge de l’opérateur :
l’usage d’allégations générales non justifiées et non étayées par des éléments objectifs, telles que « respectueux de l’environnement » ou encore « respectueux du climat » ;
l’affirmation selon laquelle Flixbus serait « le moyen de transport le plus respectueux de l’environnement » en l’absence de toute comparaison ou justification appropriée ;
la mise en avant des avantages procurés par le « Flixtrain » alors que celui-ci n’est pas disponible en Belgique ; et,
un manque de transparence s’agissant du programme de compensation des émissions de CO2 proposé lors de la réservation d’un billet.
L’origine de l’affaire : une opération « sweep »
Cette décision trouve son origine dans une opération de surveillance de dimension européenne de type « sweep » lancée en 2020, visant à identifier les allégations trompeuses en matière de développement durable.
De telles opérations consistent généralement à passer au crible les sites Internet dans un secteur ou sur un sujet en particulier afin de détecter des infractions au droit de la consommation. Elles sont coordonnées par la Commission européenne et mises en œuvre par les autorités nationales chargées de la protection des consommateurs dans le cadre du CPC (« Consumer Protection Cooperation Network »). En cas de non-conformité, les autorités nationales peuvent demander aux opérateurs de prendre des mesures correctives appropriées.
Dans cette affaire, l’administration belge (le SPF Économie) avait identifié certaines allégations problématiques sur le site Internet local de la société de transport et adressé une demande de mise en conformité à laquelle cette dernière ne s’était pas conformée.
L’administration belge s’est donc rapprochée de son homologue allemand, l’Umweltbundesamt, qui a entamé une procédure judiciaire en vue d’obtenir la cessation des pratiques contestées.
Quels enseignements doivent être tirés de cette condamnation ?
Cette affaire souligne l’importance de justifier toute allégation en lien avec le développement durable de manière rigoureuse et transparente.
Le porte-parole de l’administration belge a salué cette condamnation comme constituant « une victoire importante dans la lutte contre le greenwashing », soulignant que celle-ci « crée par ailleurs un précédent juridique qui aide les autorités de consommateurs à prendre des mesures contre les entreprises qui utilisent des allégations environnementales trompeuses ».
De manière assez paradoxale, la vigilance semble s’imposer plus intensément encore aux entreprises soucieuses de développer des solutions plus respectueuses de l’environnement, au risque de dissuader l’innovation en matière de transition écologique.
Rappelons qu’en 2021, le Jury de déontologie publicitaire (« JDP ») avait déjà été saisi d’une plainte relative à une campagne publicitaire sur Internet mettant en avant le caractère à la fois économique et écologique du voyage en car opéré par Flixbus. Le JDP avait considéré que le voyage en car, bien qu’il soit plus faiblement émetteur de CO2 que la plupart des autres modes de transport, restait une source substantielle d’émission de dioxyde de carbone. Il ne pouvait par conséquent pas être présenté comme « bon pour l’environnement » ou comme un moyen de « rouler vert » sans la moindre relativisation.
Dans ce contexte, la transparence demeure essentielle afin de se prémunir contre les risques d’écoblanchiment. Une communication équilibrée est indispensable, les bénéfices environnementaux devant être présentés de manière nuancée et circonstanciée.
Vers un encadrement renforcé des allégations environnementales
Cette décision intervient alors que le cadre applicable aux allégations environnementales est toujours en construction, et repose aujourd’hui encore largement sur le principe général d’interdiction des pratiques commerciales trompeuses.
Aussi, la directive (UE) 2024/825 dite « anti-greenwashing » a été définitivement adoptée l’année dernière. Ce texte, qui introduit de nouvelles règles en matière d’allégations environnementales trompeuses, devra être transposé par les États membres au plus tard le 27 mars 2026.
Par ailleurs, la directive sur les allégations environnementales explicites (« Green Claims ») est en cours de négociation dans le cadre des trilogues entre la Commission européenne, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen. Ce texte instaure notamment un mécanisme de vérification préalable pour certains labels environnementaux et allégations ainsi que des critères précis pour leur justification.
Si ces nouvelles règles imposeront aux entreprises une vigilance accrue, elles devraient permettre d’offrir une plus grande sécurité juridique aux opérateurs en matière de communication environnementale.